
Il y a 4-5 ans, j'étais dans une très très mauvaise période. Je remettais ma vie en question, me traînais pour aller au travail, étais au bord de l'explosion une fois arrivée et chaque fois que mon train, le matin, passait au-dessus de Moret-sur-Loing, j'y contemplais un de mes spectacles préférés mais rapide : le Loing, les péniches amarrées le long des berges, un bâtiment qui ressemblait à une ancienne guinguette où des gens seraient venus se distraire le week-end entre amis, rire et danser au bord de l'eau, un chemin bordé d'arbres. Ce spectacle, je le voyais souvent dans la brume matinale ou baigné de la lumière douce du soleil levant.
Et ce matin où ça n'allait vraiment pas du tout, j'ai fait un truc qui scandaliserait l'UMP : une fonctionnaire s'est faite porter pâle pour ne pas aller travailler. Je suis descendue à la gare de Moret, j'ai appelé ma chef, Chantal, qui vient hélas de mourir récemment (Chantal, une personne humaine dans une hiérarchie standardisée, qu'est-ce qu'on te regrette !). Elle a compris et m'a dit d'en profiter.
Je suis descendue du mauvais côté de la gare - typique de moi, en traversant un mini-bois qui sentait bon la terre humide, suis arrivée dans un quartier résidentiel avec des 4x4 et des jardins bien organisés, puis ai retraversé un autre bois afin de me diriger vers la Seine. La Seine, le Loing, qu'importe pourvu qu'il y ait de l'eau.
Déjà, marcher parmi les arbres très hauts, écouter chanter les oiseaux, contempler les jeux de lumière à travers les feuilles m'a mis du baume au coeur. Un peu. Ensuite se sont profilées des maisons "à l'ancienne", on aurait dit que les bords de la Seine n'avaient pas changé depuis les années 50-60, je me croyais dans un Maigret. J'ai longé la Seine en direction d'un petit chemin. Il y avait une péniche dont dépendait un poulailler sur le quai. Un matou est venu se faire grattouiller sous le menton.
Et j'ai suivi le chemin pour aller là où, j'espérais, il n'y avait personne, même si on ne peut pas dire que c'était la foule ce matin-là. Après une dizaine de minutes de marche, je me suis assise sous un saule au bord de l'eau - là où c'était sec !
Et je suis restée là sans rien faire. J'écoutais le vent dans les arbres, le clapotis de l'eau lorsque

Lorsqu'un peu plus tard dans l'année, on m'a demandé de dessiner un moment de bonheur, c'est celui-là que j'ai choisi de représenter. Je ne sais pas si c'était vraiment le bonheur, mais j'étais calme et sereine, un moment précieux.
Non, je ne vais pas souvent à Moret - ça m'était arrivé il y a pas mal d'années, une visite sur les traces du peintre Sisley, mais j'en garde un souvenir... impérissable ? ému ? qui m'a profondément marquée.
Et c'est là qu'a débuté le changement.
Très belle réponse.
RépondreSupprimer