
"Imaginez! L'Angleterre des années soixante-dix, si pittoresque, si lointaine, avec ses syndicats prospères et sa mode baba cool. Une image bon enfant que viennent lézarder de sourdes menaces: tensions sociales, montée de l'extrême droite, et une guerre en Irlande du Nord qui ne veut pas dire son nom.
Mais dans ces années où le pays va basculer de l'État-providence au thatchérisme et de la musique planante au punk, Benjamin, Philip, Doug et leurs amis ont bien d'autres choses en tête: s'intégrer aux cliques et aux clubs d'un lycée archaïque, oser parler aux filles, s'affirmer comme artistes en herbe, s'échapper de Birmingham l'endormie pour des aventures londoniennes... Trop innocents pour saisir les enjeux et les intrigues qui préoccupent leurs parents. Jusqu'à ce que le monde les rattrape."
J'ai eu un petit peu de mal au début, non à entrer dans le récit, mais à m'y retrouver avec tous les personnages. Par contre, j'ai été emballée par cette fresque anglaise des années 70 racontées avec énormément d'humour et de férocité. Même si ce fut la période de mon enfance plus que de mon adolescence, j'y ai retrouvé des souvenirs à foison, y compris la présence des magnétophones et de l'incontournable marron. C'était une société en pleine effervescence, en transition, une époque de luttes sociales parfois sanglantes, de nationalisme et de racisme juste avant de basculer dans le thatchérisme.
Beaucoup d'humour mais pas seulement, bien que certains passages m'aient fait pleurer de rire dans le train ! Il me faut la suite (Le cercle fermé) !
Quelques extraits :
"Imagine. Un monde sans téléphones mobiles, sans magnétoscopes, sans Playstations. Même pas de fax ! Un monde qui n'avait jamais entendu parler de la princesse Diana ou de Tony Blair, qui n'aurait jamais imaginé partir en guerre au Kosovo ou en Irak. A l'époque, Patrick, il n'y avait que trois chaînes de télé. Trois ! Et les syndicats étaient tellement puissants que, s'ils le voulaient, ils pouvaient très bien couper une chaîne pendant toute une soirée. Il y avait même des fois où les gens étaient obligés de se passer d'électricité. Imagine !"
"Les tables qui reflétaient vaguement leurs visages étaient marron foncé, très foncé, couleur Cadbury pur cacao. Les murs étaient marron moins foncé, tendance chocolat au lait. La moquette était marron, semée de losanges d'un marron subtilement différent. Le plafond se voulait officiellement crème, mais n'en était pas moins marron, bruni par la nicotine de millions de cigarettes sans filtre. La plupart des voitures au parking étaient marron, idem pour les vêtements des clients du pub. Personne ne remarquait ce marron envahissant, ou en tout cas n'y voyait un sujet de conversation. Le monde était marron."
"- Ecoute, Fee, est-ce qu'on peut décamper ? Avec tout ce vacarme, j'ai une atroce migraine, et tous ces prolos me donnent froid dans le dos.
- On risque d'attraper quelque chose d'innommable, ajouta Fudge.
- Moi-même, je suis un "prolo", glissa Doug, le poil hérissé.
- Douglas est de Birmingham, expliqua Ffion à ses amis.
- Oh, malédiction dit Jacko. Quelle déveine, mon vieux.
- Je dois avouer que c'est incroyable comme vous maîtrisez bien notre langue, dit Fudge, rayonnant. J'arrive presque toujours à vous comprendre.
Doug, au contraire, avait toutes les peines du monde à comprendre cet étrange tandem, dont l'accent était encore plus extra-terrestre que celui de Ffion à ses oreilles de néophyte. Et ce qui n'arrangeait rien, c'est que, quand il parvenait à décrypter leurs paroles, il en croyait encore moins ses oreilles."
"Vous ne trompez plus personne, plus maintenant, avec votre timidité si charmante et votre politesse et votre ironie anglaise et votre autodérision anglaise. Demandez à n'importe quel Gallois, Ecossais ou Irlandais un tant soit peu conscient ce qu'il pense des Anglais et vous aurez la même réponse. Vous êtes un peuple cruel et sanguinaire et cupide et avide. Une nation de bouchers et de vagabonds."
"- Putain, Ben, il serait temps que tu grandisses un peu ! C'est pas parce que tu te bourres la gueule avec une fille dans une fête et que vous vous tripotez un peu... c'est pas pour autant que ça en fait ta... ta promise ou je ne sais quoi. On n'est pas dans un bouquin de Jane Austen."
Benjamin lui lança un regard mauvais. "On n'a pas dû lire les mêmes bouquins de Jane Austen. Je ne me souviens pas de ce genre de scène."
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